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APPEL et prévention des entreprises en difficulté: Un droit intangible

La procédure de mandat ad hoc est souple, simple et consensuelle (L 611-3 C.com). Le mandataire ad hoc désigné par le Président du Tribunal de commerce s’efforce dans un cadre judiciaire libre de favoriser le rapprochement informel et amiable d’intérêts antagonistes.

Il s’agit de dénouer des points de crispation juridico-financiers, dont la persistance pourrait affecter la pérennité d’une exploitation et laisser émerger un état de cessation des paiements, exposant le débiteur, à l’ouverture d’une procédure collective.

La procédure de conciliation, qui peut succéder au mandat ad hoc, est aussi confidentielle, mais plus formelle ; elle s’épanouit dans un cadre normatif notamment conçu pour protéger le débiteur qui en amont de difficultés imminentes, se soucie d’y faire face par anticipation.

En se plaçant sous protection parajudiciaire, il peut se préserver des poursuites de créanciers offensifs. Il ne s’agit pas d’une procédure collective imposant une discipline contraignante à tous, mais de privilégier la négociation avec les principaux d’entre eux (banques, fournisseurs ou bailleurs…) qui peuvent continuer à poursuivre leur débiteur en paiement. C’est pourquoi la loi permet de freiner l’enthousiasme et canaliser les récalcitrants, afin d’éviter qu’ils fassent obstruction à la recherche d’un accord destiné à mettre terme aux difficultés de l’entreprise.

Ainsi, le débiteur en conciliation peut demander au Président qui a ouvert la procédure, de faire application de l’article 1343-5 du code civil (ouvrant notamment droit à échelonnement sur un délai maximum de 24 mois) à l’encontre d’un créancier poursuivant ou refusant la demande de suspension d’exigibilité faite par le conciliateur.

L’article L 611-7 alinéa 5 renforce ce texte en prévoyant que le débiteur peut assigner son créancier devant le juge de conciliation, qui statuant selon la procédure accélérée au fond, peut aussi reporter ou échelonner le paiement des dettes non encore échues pendant la durée de la mission du conciliateur (maximum 5 mois).

Jusqu’ici, la jurisprudence n’avait pas eu à se prononcer sur les recours ouverts à l’encontre d’une décision du juge ayant ouvert la conciliation, appelé à statuer sur une demande de report d’exigibilité ou de moratoire au visa de ce texte. C’est chose faite.

Un arrêt de la Cour de cassation du 25 octobre 2023 (22-15776) enseigne qu’une telle décision est susceptible d’appel, même si comme en l’espèce, le juge avait fermé cette voie de son propre chef, en précisant que sa décision était rendue « en dernier ressort », inexactitude évidemment impropre à supprimer un droit ; or en l’absence de texte spécial contraire l’interdisant, la voie de l’appel était nécessairement ouverte au visa de l’article 536 alinéa 1er CPC.

A retenir : Au regard des articles 543 CPC et R 662-1 C.com., toute décision du Président du Tribunal de commerce imposant un report de paiement d’une dette au cours d’une procédure de conciliation est susceptible d’appel de la part du créancier.

Jacques Varoclier