Cass .com 9 juillet 2025 n°24-10428 Arrêt 389 FS-B (à rapprocher de l’arrêt du même jour 23-21160)
Il est admis que des dispositions extrastatutaires peuvent compléter mais déroger aux statuts. (Cass.com 12-10-22 n°21-15382).
Un pas de plus est ici franchi par la Cour de cassation ; au visa des articles L227-1 & L227-5 du Code de commerce, elle censure un arrêt de la Cour d’appel de Paris ayant alloué indemnisation à un dirigeant révoqué, sur la base de la délibération l’ayant nommé, spécifiant contrairement aux statuts qu’il pourrait prétendre à dommages intérêts en cas de révocation sans justes motifs.
Mais la Cour de cassation a jugé que même adoptée à l’unanimité, une telle décision des associés ne pouvait juridiquement engager la SAS, dès lors qu’elle méconnaissait les statuts dans un domaine où la loi leur réserve le soin de fixer les règles ; or tel est le cas de l’article L227-5 C.com relatif à l’organisation de la direction d’une SAS et laissant dès lors aux statuts le soin de préciser les modalités de révocation de ses dirigeants.
En dehors de ces cas, il devrait être possible de transposer les solutions applicables aux autres formes sociales. Ainsi, a-t-il été jugé que dans une SARL, les associés pouvaient par une décision unanime, libérer le gérant de sa clause de non-concurrence (Cass.com 29-01-20, n° 18-15179) ; de même, l’unanimité des associés peut voter une répartition des bénéfices différente de celle prévue aux statuts d’une société civile.
Par ailleurs, si la SAS être engagée par un vote des associés en contradiction avec ses statuts, rien n’interdit en revanche à des tiers dans le cadre d’un protocole d’investissement, de se porter fort (= s’engager à faire le nécessaire pour) que la nomination du DG révoqué prévoira le versement d’une indemnité en cas de révocation injustifiée. Un tel engagement est valable car personnel aux signataires du protocole d’investissement ; il ne peut donc être jugé contraire aux statuts comme l’avait à tort jugé la Cour d’appel de Nancy. C’est pourquoi son arrêt est cassé par la Cour par arrêt distinct prononcé le même jour par la Cour de cassation. (23-21160 388 FS-B)
En résumé, le DG révoqué ne pouvait poursuivre la SAS révoqué ; il était fondé en revanche fondé à agir contre les porte- forts. En l’espèce, ils avaient formellement respecté leur engagement et fait inclure le versement d’une indemnité dans l’acte de nomination.
Toutefois une question demeure, a priori non encore tranchée : Leur engagement supposait-il pour les porte-forts de faire modifier les statuts, pour que la SAS fût valablement engagée ?
La piste demeure sans doute à explorer apprécier s’ils sont débiteurs de dommages et intérêts au regard de l’obligation souscrite au visa de l’article 1204 du Code civil.
Jacques Varoclier
Avocat à la Cour