Réparation d’un préjudice contractuel : plancher ou plafond ?

Clause pénale et clause limitative de responsabilité : Cass.com 25 juin 2025 n° 24-14675

La méconnaissance d’une obligation contractuelle peut être sanctionnée par une clause pénale, destinée à motiver et contraindre le débiteur à exécuter le contrat, en l’exposant à défaut, à devoir verser des dommages et intérêts. Une telle clause peut prévoir un « plancher » ; en revanche, si la clause fixe un plafond, elle change de nature juridique et devient une clause limitative de responsabilité.

Une clause pénale peut évaluer forfaitairement le montant de la sanction pécuniaire dès la signature du contrat. Elle s’applique alors, sans que le créancier n’ait à apporter la preuve de son préjudice (Cass. Soc. 27-3-2024, n°22-14736) et ceci même s’il s’agit d’un montant incompressible, d’un « plancher », excluant minoration judiciaire. 

En l’espèce, un contrat de concession prévoyait le paiement d’un forfait minimal de 200.000 € en cas violation par le concessionnaire de l’obligation de non-concurrence souscrite. Le concédant n’avait ainsi pas à prouver son préjudice réel, sauf à souhaiter obtenir plus que le plancher contractuel convenu. (Cass.com 25-6- 2025, n° 24-14675).

Pour autant, s’agissant d’une clause pénale, le juge conserve le pouvoir d’en réduire le montant, si son application aboutit à une sanction manifestement excessive. Ainsi un plancher contractuel est réductible mais au seul visa de l’article 1231-5 du Code civil. Ce forfait minimal instaure une forme de prévisibilité et éclaire le débiteur sur le prix de ses manquements éventuels mais cette liberté contractuelle se pratique sous la vigilance protectrice du juge, attentif à éviter tout excès conduisant à un enrichissement injustifié ou disproportionné du créancier. 

En résumé, le plancher s’impose…, sauf si son montant est exorbitant et peut alors être minoré par le juge, veillant à concilier sécurité contractuelle et équité.

En revanche, un plafond contractuel d’indemnisation a pour objet de fixer une limite à la réparation du préjudice, mais sans exonérer le créancier d’en apporter la preuve, même s’il ne peut obtenir plus que le plafond convenu. (Cass.com 04-16069 FS-PB). Ici, le juge ne dispose pas du pouvoir de régulation qu’offre la clause pénale ; tout au plus pourrait-il, mais dans des cas extrêmes et donc rares portant atteinte à la substance même du contrat, juger la clause non-écrite.

A la différence d’une clause pénale excessive, le juge n’a pas le pouvoir de “modérer” un plafond. Il peut au mieux écarter la clause limitative, si elle porte atteinte à l’ordre public contractuel (obligation essentielle, faute lourde ou dol).

Jacques Varoclier

Avocat à la Cour