LEURRE DE VÉRITÉ

Leurre de verité

La mauvaise foi juridico-judiciaire est rarement évoquée par la Cour de cassation qui n’en donne aucune définition positive, son existence étant laissée à la libre appréciation des juges. Ainsi apparaît-elle comme à travers un sténopé, en image inversée de la bonne foi. Si cette dernière est un élément du juste, son contraire devient indice de l’injuste, notion qui n’a pas besoin de dictionnaire pour être ressentie ou perçue.

La mauvaise foi se reconnaît au dessein de celui qui intentionnellement travestit faits, actes ou engagements, donne primauté à la lettre sur l’esprit ou dévoie l’apparence. Elle décrit l’insincérité en action, mue par la volonté de capter un avantage indu ou léser autrui. Elle moque la loyauté juridique et intellectuelle, qui fonde son contraire, la bonne foi.

Cette dernière, généralement présumée en droit, vient de faire une entrée remarquée dans notre code civil, à la faveur de l’ordonnance du 11 février 2016. Codifiée à l’article 1104 al.2 du code civil, elle devient un devoir d’ordre public, applicable des pourparlers jusqu’à l’exécution du contrat.

La mauvaise foi relève non de l’erreur, de la négligence ou de l’imprudence, mais de la faute et de la perfidie ; elle se mesure à l’aune de la liberté et de la conscience morale, de la volonté délibérée de nuire, au point que dès 2008, la jurisprudence présumait de mauvaise foi le vendeur professionnel en matière de vices cachés.

Elle recouvre des hypothèses variées où le principe de loyauté est volontairement mis à mal, dans la perspective délibérée de tromper autrui, pratiquer réticence ou mensonge. Elle est judiciairement sanctionnée lors de la conduite déloyale d’une procédure, en cas de fraude à la loi ou lorsque est avérée la résolution d’altérer l’information nécessaire à l’expression libre du consentement, lors de la conclusion ou l’exécution d’un contrat.

Par Jacques Varoclier