Le dol

Le droit des contrats repose sur l’article 1134 du code civil selon lequel : « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites » ; le consentement de chaque partie doit toutefois être exprimé librement c’est-à-dire sans violence, erreur ni dol.

Ces principes régissent tous les contrats et donc les cessions de droits sociaux.

Or, l’acquéreur des titres d’une société est parfois troublé lorsqu’il découvre une réalité de l’entreprise acquise en dissonance avec ses attentes. Au fil des dernières années, le contentieux en matière de cession de sociétés s’est développé.

L’action en garantie des vices cachés (Art 1641 C. Civ.) permet à un acheteur d’obtenir des dommages et intérêts, résolution de la vente ou encore une simple réduction du prix, s’il apporte la preuve de la mauvaise foi du cédant, c’est-à-dire de sa connaissance du vice au moment de la cession. Toutefois une telle action n’est pas aisée à mettre en œuvre en droit des sociétés car une cession de droits sociaux est juridiquement une cession de créance dont le cédant garantit non la valeur des titres cédés mais uniquement leur existence.

La découverte ultérieure d’un passif ne peut constituer un vice caché et doit être couvert par une garantie d’actif et de passif consentie par le vendeur pour prémunir l’acquéreur des conséquences financières de l’apparition de tous dommages dont le fait générateur serait antérieur à la cession et non enregistrés comptablement. Une telle garantie connait aussi des limitations conventionnelles (plafond, franchise, seuil de déclenchement….).

De même, l’action en nullité pour erreur est délicate à mettre en œuvre car là encore ne peut porter sur la valeur des titres mais uniquement sur leurs qualités substantielles, notion délicate à cerner en la matière et rares sont les circonstances où la jurisprudence en retient l’existence.

C’est pourquoi le dol visé à l’article 1116 du C. Civ. est devenu un fondement privilégié lorsqu’un acquéreur, estimant avoir volontairement été trompé par son cocontractant, sollicite la nullité de la cession et/ou des dommages intérêts. L’article 1304 du C. Civ. ouvre un délai de 5 ans pour agir.

L’acquéreur floué doit alors démontrer qu’il n’aurait pas acheté si son vendeur avait agi avec loyauté et bonne foi, mais encore fournir la preuve tant de l’intention de l’induire en erreur que les éléments matériels du dol, actes positifs (manœuvres frauduleuses ou mensonges), ou abstention fautive, réticence, silence coupable, s’ils ont eu un impact sur son consentement.

La loyauté contractuelle est donc un facteur majeur pour se préserver des sanctions judiciaires ; néanmoins, la rédaction des actes doit aussi être extrêmement prudente et adaptée à chaque situation, afin de minimiser ce nouveau risque de contentieux à tendance inflationniste.

Jacques VAROCLIER